ARTISTE EN RÉSIDENCE
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MOHSIN TAASHA
En résidence du 6 septembre 2021 au 3 janvier 2022.
Né en 1991 à Kaboul (AF).
L’artiste Moshin Taasha est originaire de Kaboul et appartient à la communauté Hazara.
Les racines de son art se situent dans la culture millénaire de l’ancienne perse tout en véhiculant son propre regard sur le monde contemporain. The Rebirth of the reds sont des cycles picturaux et performatifs débutés en 2016 suite à l’attentat suicide à Deh Mazang (Kaboul).
La manière dont le site de Deh Mazang a été marqué par cet événement et la façon dont tous les sens ont été bouleversés par la vue des fragments de corps et l’odeur si forte et intense du sang ont eu un réel impact sur l’artiste. Il s'agit d'une blessure profonde qui se reflète collectivement dans l'intimité d'un peuple et qui, pour se guérir, a besoin de se manifester universellement.
L’artiste devient le narrateur d’histoires collectives, la voix d’un "grand nombre". Le langage avec lequel Moshin Taasha raconte ses "histoires visuelles" est influencé par des codes picturaux classiques et traditionnels, dans lesquels les motifs géométriques des tapis et l'esthétique décorative de la calligraphie coranique sont le cadre d’histoires narrées, coagulées dans des formes humaines enveloppées dans des draps rouges. Nous faisons face à une indication ténue d'humanité qui fait écho à De Chirico, de pantins sans vie et immobiles, complètement dépersonnalisés par le règne du "drapeur-censeur" imposé par le régime taliban. Ces formes ne sont vivifiées que par l'utilisation dominante, presque obsessionnelle, du pourpre qui, personnifié, devient le véritable et unique protagoniste. L'utilisation de cette couleur a une forte composante symbolique : elle représente le sang, la mort et, en même temps, l'amour, la passion, la vie. Dans l’esprit de l’artiste, la nature et le paysage natal entrent également en force, et rien ne suffit à dissoudre et à dissoudre leur beauté intime des figures humaines enveloppées dans de larges drapés pourpres comme de fragiles pétales de coquelicots ou de tulipes qui couvrent les prairies jusqu’à Mazar El Sharif.
Avec la participation de la troupe théâtrale Sorkh va Safid, l'artiste a donné vie à ses peintures, en mettant en scène de véritables performances dans les rues de la ville et dans les grandes zones rurales. Les œuvres picturales semblent avoir voulu briser le cadre du support bidimensionnel, acquérant une plasticité au nom d'un message visant à impliquer de plus en plus de personnes.
Le contraste entre la terre recouverte de neige et le passage ordonné de ces figures rouges a une forte charge symbolique. La terre immaculée, suinte des gouttes de sang comme une profonde entaille à laquelle il faudrait apporter un remède définitif. L'artiste est le poète d'une contemporanéité tragique dans laquelle chaque cri, chaque souffrance est un élément clair et défini et pour lequel il est nécessaire de créer une conscience universelle et un esprit critique pour une meilleure compréhension de la réalité.
Texte de Chiara Ciurlia
Mohsin Taasha est né en 1991 à Kaboul. À l’arrivée au pouvoir des talibans, sa famille migre au Pakistan où elle reste jusqu’en 2004. À son retour, Ostad Raahi, un des enseignants de Mohsin, lui ouvre de nouvelles perspectives : il prend des cours avec deux maîtres de la miniature, Khadem Ali et Sher Ali, et étudie la peinture aux Beaux-Arts de Kaboul. Il se dégage très vite du réalisme et des règles de la miniature traditionnelle. En 2010 il remporte l’Afghanistan Contemporary Prize, participe en 2021 à la dOCUMENTA 13, avant d’aller étudier à l’université de Beaconhouse, à Lahore, au Pakistan. Il expose au Beirut Contemporary Art Fair (2013) et à la 56ème Biennale de Venise (2015).